En direct
A suivre

Roland-Garros 2023 - Nicolas Escudé : «le bilan n'est pas bon lorsque l'on regarde les résultats»

Nicolas Escudé, directeur technique national du tennis français. [Serge Haouzi / Icon Sport]

Au lendemain de l'élimination d'Arthur Rinderknech au deuxième tour du tournoi de Roland-Garros, Nicolas Escudé, le directeur technique national du tennis français, dresse un premier bilan des performances françaises.

Pour la troisième année de suite, il n'y aura aucun joueur français en 1/8e de finale de Roland-Garros. La défaite d'Arthur Rinderknech contre Taylor Fritz, ce jeudi, a sonné le glas des ambitions françaises. Nicolas Escudé, le directeur technique national du tennis français, a pris le temps de revenir en conférence de presse sur les prestations des joueurs français.

Après deux tours, il n'y a plus aucun Français dans le tournoi de Roland-Garros, quel est votre bilan ?

Le bilan n'est pas bon, quand on regarde les résultats. Après, je pense qu'on ne peut pas non plus rendre la Fédération responsable de tout. Ça ne veut en aucun cas dire que la Fédération n'assume pas les responsabilités qui sont les siennes. On met depuis maintenant deux ans énormément de choses en place sur la formation de nos joueurs, la formation de nos joueuses, dès le plus jeune âge, dès l'école de tennis avec la modernisation. Que ce soit sur la façon aussi dont peut fonctionner Poitiers, la façon dont le centre national aussi fonctionne. On a tous un seul but, c'est que forcément nos joueurs et nos joueuses brillent. Après, ce n'est pas le cas aujourd'hui. Mais, les premiers, quelque part, pénalisés et responsables un petit peu de ces résultats-là, ce sont les joueurs et les joueuses aussi.

Est-ce qu'il n'y a pas une trop forte attente sur Roland-Garros par rapport à d’autres Grands Chelems ?

Forcément, pour les joueurs français, tout comme pour les Américains à l’US Open, les Anglais à Wimbledon, ou les Australiens à l'Open d'Australie. Il y a forcément une attente supérieure, avec en plus une année particulière où l’on fête les 40 ans de la victoire de Yannick Noah. Malheureusement, au niveau masculin, on a cette rengaine depuis 40 ans. Mais il ne faut pas oublier non plus que chez les filles, cela a pu gagner, ici à Roland-Garros, mais aussi dans d'autres tournois du Grand Chelem. Oui, il y a une attente et ils en sont conscients les uns et les autres. 

Caroline Garcia aurait pu être une prétendante ? 

C'est pourquoi j'ai dit «garçon». Caro, c'est un peu différent. C'est sûr que par son statut, par le classement qui est le sien, par les résultats qu'elle a pu avoir sur la fin d'année dernière, et je l'avais déjà dit à l'époque, forcément, les objectifs changent pour elle. Chaque fois qu'elle doit s'afficher et s'aligner sur un tournoi, c'est pour aller au bout. Et forcément, c'est aussi le cas sur un tournoi du Grand Chelem.

Que manque-t-il au tennis français ? Vous dites que depuis deux ans, un gros travail est fait, des choses sont mises en place, mais que manque-t-il pour voir un Français, peut-être pas gagner Roland-Garros, mais au moins en voir un en deuxième semaine ?

Déjà, on n'a pas un Français qui est tête de série. Ce n'est pas juste Roland-Garros, c'est un travail, un investissement de tous les jours, toute l'année, pour pouvoir avoir un classement, déjà, d'une part, qui va vous permettre d'être tête de série. Et donc, forcément, au niveau des garçons, avoir un plus grand nombre de garçons classés a minima dans les 30 premiers. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Vous dire exactement ce qui peut manquer individuellement à chaque garçon, je ne le sais pas forcément. Par contre, on est à leurs côtés. Que ce soit avec le boulot que peut faire Paul-Henri ou Ivan maintenant à nos côtés, ou Seb, en tant que capitaine de Coupe Davis ou Julien Benneteau au niveau des filles.

On est en contact avec ces joueurs-là, avec leur staff. On n'est pas non plus au quotidien en permanence avec eux, à l'entraînement, aux compétitions, pour voir ce qui peut s'y passer. Mais, il y a une logique implacable qui est que, oui, notre numéro 1 français est tout juste dans les 40 premiers aujourd'hui. Cela dit, ça fait plaisir de le revoir déjà à ce niveau, et je pense que ça va continuer à avancer quand même quelque part pour lui, en la personne d'Ugo Humbert. Et après, ce sont pour tous, et le haut niveau en règle générale, des projets individuels. Ce sont eux qui se structurent, qui choisissent leur staff, qui choisissent leurs entraîneurs, qui choisissent leurs préparateurs physiques, qui mettent en place forcément une feuille de route par rapport à des objectifs qu'ils se fixent, et des moyens à mettre aussi en place pour pouvoir arriver à les atteindre. Mais voilà, malheureusement, aujourd'hui, on n'y est pas, du moins ils n'y sont pas. Enfin, je ne pense pas qu'ils se satisfassent des résultats qui sont les leurs aujourd'hui.

Avant le début du tournoi, Yannick Noah disait aux jeunes joueurs français, si vous voulez gagner, il faut faire vos bagages et vous casser, parce que vous êtes entouré de gens qui n'ont jamais rien gagné. Que lui répondez-vous ? 

Jo-Wilfried Tsonga ne s'est jamais entraîné avec un entraîneur étranger, Gaël Monfils ne s'est jamais entraîné avec un entraîneur étranger, et Richard non plus. Ils n'ont pas gagné de Grand Chelem. Donc ça ne veut rien dire, tout simplement 

Pensez-vous qu'il y a suffisamment d'efforts qui sont faits sur la préparation mentale dans le tennis français aujourd'hui ? 

Je pense que ce n'est pas purement français. Ce domaine-là est extrêmement important dans tout sport de haut niveau. Après, c'est un sujet pour le coup, et un domaine que j'ai pu prendre à bras le corps dès mon arrivée à la Direction technique nationale, pour structurer un pôle et servir au mieux, je dirais, tous les jeunes que l'on peut avoir en formation. Après, c'est toujours pareil, est-ce que nos meilleurs joueurs ou nos meilleures joueuses, individuellement parlant, dans leur structure, se structurent par rapport à la dimension mentale et psychologique ? Travaillent-ils avec quelqu'un ou pas ? Osent-ils en parler ou pas ? On a pu le savoir par le passé, bon nombre de joueurs ou de joueuses pouvaient travailler avec quelqu'un mais ne souhaitaient pas que cela se sache. Après, je l'ai souvent dit, c'est un mot qui a été un peu galvaudé en France. C'était un petit peu un fourre-tout : "il a gagné parce qu’il a du mental", "il a perdu parce qu'il n'a pas de mental". Il ne faut pas oublier l'essentiel, le tennis, c’est travailler, passer des heures sur le terrain, travailler physiquement, c'est un ensemble de plein de choses dont ce domaine-là.

Les Français aujourd'hui ont du mal à s'exprimer dessus sur terre battue ?

J'ai l'impression qu’Arthur Fils travaille pas mal sur terre battue, Luca Van Assche se débrouille aussi très, très bien. Ce qu'on fait, même à Poitiers, c’est d’une part que l’on essaie de les faire jouer un maximum, et de les faire jouer dehors. Dès qu'il fait beau, même en plein hiver, dès lors que l'on peut jouer dehors, déjà on joue dehors, dans un premier temps. Et au maximum sur terre battue. Ils y passent le plus de temps possible. C'est une orientation que l'on a prise depuis deux ans. Il n'y a pas de secret, pour pouvoir arriver à briller sur une surface aussi spécifique que celle-là, avec l'attachement que l'on peut y avoir avec ce tournoi de Roland-Garros qui se dispute dessus, oui, on se doit d'y passer beaucoup plus de temps. Et puis, cela aide aussi pour les autres surfaces de passer du temps sur terre battue. Les échanges sont plus longs, il y a une approche tennistique différente, le tennis ne se joue pas forcément en juste un grand service et un coup droit derrière. Il y a une construction des points. En tout cas, nos jeunes, garçons comme filles, y passent beaucoup plus de temps aujourd'hui que par le passé.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités