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«Vous n'aurez pas ma haine» : pour Pierre Deladonchamps, «l'art doit s'emparer de notre Histoire»

Le comédien ne voulait pas que le film tombe dans le sensationnalisme. [© Lou BENOIST / AFP]

Dans «Vous n'aurez pas ma haine», qui sort ce mercredi, Pierre Deladonchamps incarne Antoine Leiris, qui a perdu sa femme dans les attentats du 13 novembre 2015, et dont la lettre ouverte a bouleversé le monde entier. Pour CNEWS, l'acteur de 44 ans revient sur ces mots d'une «grande sagesse».

Le soir du 13 novembre 2015, Hélène se rend au concert des Eagles of Death Metal au Bataclan, ignorant qu'elle vit ses derniers instants. Cette maman de 35 ans fait partie des 130 personnes tuées lors des attentats de Paris et de Saint-Denis. Quelques jours seulement après le drame, son mari, le journaliste Antoine Leiris, publie une lettre ouverte sur Facebook intitulée «Vous n'aurez pas ma haine», dans laquelle il s'adresse aux terroristes qui ont «volé la vie d'un être d’exception, l’amour de (sa) vie, la mère de (son) fils», alors âgé de 17 mois. Une lettre qui deviendra virale. Et qui donnera matière à un livre paru en 2016 aux éditions Fayard. Dans cette adaptation cinématographique réalisée par l'Allemand Kilian Riedhof, Pierre Deladonchamps donne la réplique à Camélia Jordana.

Que faisiez-vous le soir du 13 novembre 2015 ?

J’étais chez moi. J’ai vu sur mon téléphone qu’il y avait eu des explosions au Stade de France. J’ai fini par allumer la télé et j'ai découvert la prise d’otages au Bataclan, en plein concert. J’ai ressenti de la stupéfaction et de la peur.

Connaissiez-vous le texte d’Antoine Leiris ?

Je n’avais pas lu son post sur Facebook, mais j’avais vu Antoine quelques jours après les attentats sur le plateau de l’émission «C à vous». Il expliquait que son texte avait été mis en une du quotidien Le Monde et qu’il avait été relayé dans le monde entier. Il a eu une réaction à chaud qu’il a réussi à refroidir, et ce malgré un chagrin immense. Si son message a été autant lu et reposté, c’est que ses mots ont eu une résonnance auprès des victimes rescapées, des proches, et de toute la nation. Cet homme a été en première ligne et pourtant, il a décidé de ne pas haïr les terroristes. Sa réponse est d’une grande beauté, pleine de sagesse et d’une incroyable intelligence émotionnelle.

L’avez-vous rencontré avant de l’interpréter dans cette adaptation cinématographique ?

On a simplement échangé des messages. S’il a validé le scénario, Antoine n’est pas intervenu dans ce projet. Cela fait sept ans qu’il essaie de se reconstruire avec son fils, et il ne veut pas ressasser le passé. Antoine a choisi la vie et souhaite passer à autre chose.

Le cinéma est un vecteur d'avancée sociale, de progrès.

J’ai su qu’il était heureux que je l’incarne à l’écran, et il a apprécié le film. J’avais à cœur que cette adaptation lui plaise, et je ne voulais surtout pas le décevoir.

«Revoir Paris», «Novembre», «Vous n’aurez pas ma haine»… Sept ans après le drame et à quelques mois de la fin du procès de Salah Abdeslam et de ses coaccusés, nombreux sont les films qui reviennent sur les attentats du 13-Novembre.

C’est un pur hasard, mais je trouve cela bien que ces œuvres fictionnelles qui ne tombent jamais dans le voyeurisme ou le sensationnalisme, sortent après le procès. Par respect pour toutes les personnes, proches ou rescapés, pour qui le souvenir du drame est encore frais dans les mémoires. L’art doit s’emparer de notre Histoire. Pour la mémoire, le deuil collectif et afin de transmettre un message aux jeunes générations, il me semble important qu’un fait historique soit traité par le prisme de différents points de vue. Par exemple, «Papy fait de la résistance» et «La liste de Schindler» évoquent la Seconde Guerre mondiale de manière différente, mais sont deux films aussi essentiels l’un que l’autre.

Le cinéma a-t-il un rôle prépondérant dans l’éveil des consciences ?

Le cinéma est un vecteur d’avancée sociale et de progrès. Il permet de se remettre en question et de créer le débat. S’il n’y a plus d’art, il n’y a plus de société.

Je ne me considère pas comme un tragédien.

Les fictions ou les documentaires nous donnent la possibilité de réfléchir sur notre condition humaine. Et dans un travail de reconstruction, «Vous n’aurez pas ma haine» apporte sa pierre à l’édifice.

Le public vous a découvert dans «L’inconnu du lac» d’Alain Guiraudie, qui vous a valu le César du meilleur espoir masculin en 2014, avant de vous retrouver dans de nombreux rôles dramatiques à l’instar de «Plaire, aimer et courir vite» ou «Les Chatouilles». Vous n’êtes pas fermé à la comédie ?

Pas du tout ! J’essaie constamment d’ouvrir le champ des possibles et ne m’enferme dans aucun genre. Je ne me considère pas comme un tragédien. La preuve, j’ai récemment tourné dans les comédies «Petite leçon d’amour» avec Laetitia Dosch, et «La page blanche» de Murielle Magellan. Et je serai bientôt à l’affiche d’«Hawaii», réalisé par Melissa Drigeard.

Pourquoi êtes-vous si rare au théâtre ?

J’ai adoré jouer en début d’année «Les amants de la Commune», avec Isabelle Carré. Mais le théâtre nécessite du temps entre les répétitions, les représentations et une éventuelle tournée. Je ne vis pas à Paris et je ne peux m’éloigner trop longtemps de mes enfants.

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