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Coronavirus : Tout savoir sur Françoise Barré-Sinoussi, la présidente du Comité analyse recherche et expertise («CARE»)

Françoise Barré-Sinoussi est une virologue reconnue au niveau mondial, co-découvreuse du VIH et prix Nobel de Médecine 2008. [STEPHANE DE SAKUTIN / AFP].

Elle est sans doute l'un des plus brillants cerveaux français et ses connaissances seront précieuses dans la lutte contre le coronavirus. La virologue Françoise Barré-Sinoussi, 72 ans, a été nommée à la tête du «CARE», le Comité analyse recherche et expertise, qui doit être installé par Emmanuel Macron ce mardi 24 mars. Portrait.

Si elle est officiellement en retraite depuis 2015, Françoise Barré-Sinoussi n'a pourtant jamais vraiment cessé de travailler. 

Première Française à avoir obtenu un prix Nobel de médecine, elle est mondialement reconnue pour être une combattante obstinée de la lutte contre le sida.

une virologue eminemment respectée

Née le 30 juillet 1947 à Paris, elle rejoint l'Institut Pasteur en 1977, sitôt son doctorat ès sciences en poche.

En compagnie de Jean-Claude Chermann, avec qui elle avait travaillé sur les rétrovirus animaux, elle intègre le département de virologie créé cinq ans auparavant par Luc Montagnier.

Au début des années 1980, comme nombre de scientifiques sur la planète, elle assiste impuissante aux premiers signes d'une nouvelle épidémie qui se traduit souvent par l'émergence inexpliquée d'une forme rare et atypique de cancers, comme le sarcome de Kaposi, qui décime les communautés homosexuelles du monde entier.

Utilisant ses connaissances des rétrovirus, Françoise Barré-Sinoussi analyse alors les premiers prélèvements faits sur les malades français mis en culture par son collègue, le biologiste et virologue Luc Montagnier. 

La scientifique passe dès cet instant le plus clair de son temps campée derrière son microscope électronique déterminée à trouver l'agent responsable de la maladie.

Co-découvreuse du VIH, le virus responsable du sida

En inspectant régulièrement les cultures, sa patience sera récompensée le 4 février 1983. La jeune scientifique et ses pairs découvrent en effet un nouveau rétrovirus totalement inconnu et parviennent à l'isoler.

Quelques semaines plus tard, le 20 mai 1983, Françoise Barré-Sinoussi et ses collaborateurs publient alors un article dans la prestigieuse revue américaine Science où ils annoncent leur découverte.

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Luc Montagnier (G), Jean-Claude Chermann (C) et Françoise Barre-Sinoussi [AFP / Archives].

A ce stade, le nouveau rétrovirus est encore nommé LAV (Lympho-adénopathy Associated Virus) mais il sera vite renommé VIH, pour virus de l'immunodéficience humaine.

Ce virus est redoutable puisqu'il affaiblit le système immunitaire humain le rendant vulnérable à de nombreuses infections opportunistes causant le syndrome d'immunodéficience acquise, le sida. Cette découverte est une révolution.

Trente ans de travaux et de découvertes

En 1985, Françoise Barré-Sinoussi se rend pour la première fois en Afrique plus exactement à Bangui, en République Centrafricaine.

Sur place, elle constate de ses propres yeux les ravages du sida, ce qui la poussera à se battre pendant toute sa carrière en faveur de l’accès des pays pauvres aux traitements et des accords de coopération nord-sud.

En parallèle, Françoise Barré-Sinoussi ne cesse bien sûr d'étudier le VIH et ses travaux, qui se sont étalés sur plus de trente ans, ont mené à de nombreuses percées scientifiques décisives, incluant des technologies de tests et de diagnostics, et, surtout, des trithérapies qui ont permis de sauver des millions de vies.

En 2008, lorsqu'elle reçoit avec Luc Montagnier le prix Nobel de Médecine (décerné également à Harald Zur Hausen de l’Université d’Erlangen-Nuremberg pour ses travaux sur le papillomavirus, NDLR), la directrice générale de l'Institut Pasteur de l'époque, Alice Dautry-Varsat, aura alors cette phrase dans Le Monde : «Françoise a du courage, de la ténacité et un grand sens éthique. Elle se bat depuis des décennies dans le monde entier auprès des gouvernements et des institutions, mais aussi sur le terrain, auprès des malades, souvent dans les pires conditions».

Des qualités et une expérience qui seront à coup sur plus que précieuses aujourd'hui alors que la France et le monde font face à un nouveau virus, cette fois de type corona, le SARS-CoV-2, parti en décembre dernier de la ville chinoise de Wuhan et qui depuis ne cesse de s'étendre.

Face à une nouvelle épidémie

Dans cette séquence plus que troublée, fébrile même, dans laquelle la planète tout entière attend impatiemment un remède, elle s'apprête à présider le Comité analyse recherche et expertise (Care).

Autour d'elle une douzaine de chercheurs et de médecins de haut-rang dont la tâche consistera essentiellement à conseiller le gouvernement sur les traitements et les tests en cours contre le coronavirus.

Et reconnue pour son intransigeance, Françoise Barré-Sinoussi a déjà tenu à imprimer sa marque, avant même l'installation du CARE par le président de la République.

Interrogée par Le Monde sur la chloroquine, antipaludéen au coeur d'une polémique après que le directeur de l'Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, à Marseille, l'a annoncé comme prometteur contre le coronavirus sans convaincre toute la communauté scientifique, elle a tenu à mettre les choses au clair.

Insistant sur l'impératif de la «rigueur scientifique», notamment en ce qui concerne l'utilisation de l'hydroxychloroquine, «dont l'efficacité n'a pas été prouvée de façon rigoureuse», selon elle, Françoise Barré-Sinoussi a indiqué attendre les résultats d'un essai plus large, mené actuellement sur 3.200 personnes, dont 800 en France.

«De premières analyses fiables devraient être connues dans une quinzaine de jours. Cet essai est fait dans les règles de l'art. Soyons patients», a-t-elle dit. Ses pairs sont prévenus.

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