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Covid-19 : peut-on rendre le futur vaccin obligatoire ?

Rien n'empêche les pouvoirs publics d'imposer le futur vaccin anti-Covid pour des questions de salubrité publique, sur le terrain politique et celui de l'opinion publique le sujet est en revanche nettement plus explosif. [Photo d'illustration / JOEL SAGET / AFP].

Les récentes annonces sur l'efficacité potentielle de plusieurs vaccins contre le Covid-19 ont fait naître dans la classe politique française un vif et singulier débat. Alors que la plupart des pays du monde ont en effet accueilli les résultats des différents laboratoires avec soulagement, plusieurs dirigeants hexagonaux appellent à rendre le futur vaccin obligatoire pour contrer les réticences de certains Français. Mais peut-on vraiment imposer le vaccin ?

Vu sous le prisme purement législatif, la réponse à cette question est indubitablement «Oui».

En accord avec les autorités de Santé, et à partir du moment où les règles du débat démocratique sont respectées, le gouvernement peut tout-à-fait rendre le futur vaccin contre le coronavirus obligatoire.

Le précédent des vaccins pour enfants

L'histoire récente nous montre d'ailleurs un exemple probant, puisqu'en 2018, Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé, avait, en association avec le précédent Premier ministre Edouard Philippe, rendu obligatoires les huit vaccins pour enfants de moins de 2 ans jusqu'ici recommandés, portant leur nombre total à 11.

Pour appuyer sa décision, le ministère de la Santé n'avait eu de cesse de marteler que cette obligation vaccinale répondait «à un problème de santé publique», «la couverture vaccinale étant insuffisante en France face à la réapparition de certaines pathologies», et que la vaccination «a permis de sauver des millions de vies» en France et dans le monde.

A l'ère du Covid-19, ces arguments sont revenus dans le débat public. Dès l’annonce, lundi 9 novembre, par Pfizer et BioNTech de résultats intermédiaires très positifs quant à l’efficacité de leur vaccin, l’écologiste Yannick Jadot tranchait ainsi le lendemain sans équivoque en faveur de l'obligation vaccinale, faisant grincer au passage quelques dents dans son propre camp. Dans la foulée, plusieurs autres personnalités lui ont emboîté le pas, comme le président Les Républicains (LR) du Sénat, Gérard Larcher, ou encore Daniel Cohn-Bendit.

Une idée qui est loin de faire l'unanimité

Reste que politiquement comme auprès de l'opinion publique, l’idée est loin de faire l’unanimité. La dirigeante du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, a ainsi estimé que les Français devaient rester libres «de se faire vacciner ou non». De même, un sondage réalisé par Odoxa pour franceinfo et Le Figaro, paru le 9 novembre dernier, montrait que les réticences des Français étaient vives sur ce sujet.

D'après cette étude, 60 % des personnes interrogées s’opposent en effet à ce que le futur vaccin soit rendu obligatoire, même si, dans le même temps, un Français sur deux (50 %) dit avoir l’intention de se faire inoculer le vaccin s’il était prochainement largement déployé sur le territoire. 

Du côté du gouvernement, on préfère enfin jouer à ce stade la prudence tant le dossier est sensible. S’il a récemment confié au Monde avoir la «crainte» que «les Français ne se fassent pas assez vacciner», le Premier ministre, Jean Castex, ne plaide pas, pour le moment du moins, en faveur d’une vaccination obligatoire contre le SARS-CoV-2.

Associer et convaincre plutôt qu'imposer

Dans ce contexte peu favorable, où la France apparaît comme l'un des pays où la défiance vis-à-vis du vaccin est la plus forte au monde, d'autres voix s'élèvent donc pour appeler le gouvernement à mieux associer les citoyens aux décisions qu'il pourrait prendre.

Dans une lettre ouverte adressée à Emmanuel Macron le 11 novembre dernier, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, exhortait ainsi le président de la République à revoir la stratégie vaccinale de la France, en plaidant notamment par la mise en place d'un «comité de liaison citoyen».

Une structure qui, disait-il, pourrait répondre aux réticences d'une partie de la population qui, si elle n'est pas complotiste, peut en revanche soulever des interrogations légitimes devant cette course au vaccin effrénée qui a permis d'obtenir des résultats en un temps record, jamais vus dans toute l'histoire de l'humanité.

A cette appréhension quant à la vitesse inédite avec laquelle les candidats vaccins ont été mis au point, viennent également s'y ajouter plusieurs autres comme le manque de recul sur d’éventuels effets indésirables, la durée de l’immunité ou encore le degré d’efficacité en fonction de l’âge et des comorbidités. Cela en complément des multiples flous qui, s'ils commencent à s'estomper, persistent néanmoins toujours autour de l’organisation de la logistique et sur la manière de sélectionner les populations prioritaires.

En définitive, c'est une petite musique empreinte d'un certain compromis à atteindre qui, ces derniers jours, se fait de plus en plus insistante : celle qui voudrait qu'au lieu d'imposer, le gouvernement doive surtout faire preuve de pédagogie et convaincre.

Il s'agirait, concrètement, de persuader les Français que les bénéfices du vaccin restent supérieurs aux risques potentiels quitte à démonter chaque contre-argument un à un.

Car, à l'inverse, un passage en force ne reviendrait qu'à conforter dangereusement les mouvements anti-vaccins. 

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