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Procès du 13-Novembre : «On n’attend rien de Salah Abdeslam»

Salah Abdeslam avait provoqué la cour à l'ouverture du procès en se décrivant comme un soldat de Daesh. Salah Abdeslam avait provoqué la cour à l'ouverture du procès en se décrivant comme un soldat de Daesh. [BENOIT PEYRUCQ / AFP]

Six mois après le début de ce procès hors norme, Salah Abdeslam, seul survivant du commando meurtrier du 13 novembre 2015, va être interrogé par la cour sur les faits. De son témoignage, Patricia Correia, mère de Précilia, décédée au Bataclan, n’attend rien.

«Peut-être qu'il y a des gens qui attendent de lui une vérité. Moi, je ne serai pas déçue s'il ne s'exprime pas parce que, de toute façon, je n'attends rien», explique Patricia, qui est également vice-présidente de l’association 13Onze15 Fraternité Vérité, qui regroupe des victimes des attentats de 2015.

Resté mutique depuis son arrestation en 2016, Salah Abdeslam avait attiré l’attention, à l’ouverture du procès, pour ses provocations. «Tout d'abord, je tiens à témoigner qu'il n'y a pas de divinité à part Allah et que Mohamed est son messager», avait-il répondu au président de la Cour qui lui demandait de décliner son identité. Quant à sa profession : «J'ai délaissé toute profession pour devenir un combattant de [Daesh]», avait-il déclaré.

SALAH ABDESLAM PRÉSENTERA-T-IL DES EXCUSES ?

Des provocations très mal perçues par les parties civiles, et parfois même destructrices. «Je veux bien qu’il s’exprime, mais pas dans la provocation, explique Patricia Correia. Si c’est pour dire qu’il ne regrette rien, qu’il est un soldat et pour revendiquer ses actes, ce n’est pas la peine, il vaut mieux qu’il garde le silence. Pour les victimes, ce sont des coups de poignard supplémentaires.»

Alors qu’il avait toujours refusé de s’y soumettre, le terroriste a accepté, en novembre dernier, de passer un examen d’expertise psychiatrique. Selon le rapport, que les journalistes de franceinfo se sont procurés, Salah Abdeslam est décrit comme «pudique» et aurait confié aux psychiatres qu’il avait été «marqué» et «touché» par certaines victimes lors de leur déposition à la barre. «Ces témoignages n’ont pas été agréables à entendre», leur aurait-il confié.

Des informations qui ne font ni chaud ni froid à la mère de Précilia : «Même s’il présente ses excuses, ça ne me procurerait rien du tout. Je n’irai pas le lui reprocher, mais je m’interrogerai sur la véracité de ses propos. Comment le croire ?» s’interroge-t-elle.

Silence des accusés 

Depuis plusieurs semaines, tous les accusés, détenus et libres, ont été entendus. Des moments difficiles pour les victimes, notamment à cause du manque de déclarations et de précisions des accusés. Quand certains refusent de se présenter au tribunal, d’autres font valoir leur droit au silence, et d’autres affirment ne se souvenir de rien, n'avoir rien fait, rien vu et rien entendu. «Ceux qui sont incarcérés disent qu’après des années de prison, ils n’ont plus les souvenirs très clairs. Certains sont frappés d'amnésie. J’ai l’impression qu’on nous mène en bateau», tempête Patricia Correia, qui ajoute : «pour ma part, je me souviens parfaitement de cette nuit du 13 novembre et des jours qui ont suivi, qui resteront gravés toute ma vie et jusqu'au moindre détail dans mon esprit.» Cette maman observe par ailleurs une «réelle bienveillance» de la cour à l'égard des accusés, «malgré l'exubérance de certains». 

Mohamed Bakkali, déjà condamné à 25 ans de prison pour l’attentat du Thalys et suspecté d’être le logisticien des attaques du 13 novembre, a par exemple choisi de ne pas s’exprimer lors de son interrogatoire le 26 janvier dernier. «Ce procès a été compliqué pour moi depuis le début. Il y a eu les cinq semaines de parties civiles difficiles à encaisser, ça m'a achevé» avait-il simplement expliqué, alors que son témoignage était l’un des plus attendus. De même pour Mohamed Abrini, premier accusé a avoir été interrogé et ami d'enfance de Salah Abdeslam, qui est resté très évasif sur ses séjours en Syrie et les zones d'ombre de l'enquête. 

Malgré la frustration, voire la colère induite par l’absence de réponse et la douleur que procurent ces semaines d’audience, ce procès n’en reste pas moins vital, pour la vice-présidente de 13Onze15 : «Ce procès est nécessaire. Il doit être inscrit dans l'histoire de notre pays. On ne doit jamais oublier ce qu’il s’est passé. C’était vraiment important pour moi de m’exprimer à la barre, et de parler de ma fille, de montrer des photos. Parce que la perpétuité elle est pour nous, l'absence est indélébile jusqu’à notre dernier souffle, et pour nos enfants qui ont perdu la vie. Elle n’est pas pour eux.»

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