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Présidentielle 2022 : «La majorité des Français ont voté pour des partis contestataires», selon Bruno Jeanbart d'OpinionWay

Emmanuel Macron et Marine Le Pen arrivent en tête de ce premier tour, devant Jean-Luc Mélenchon. [PASCAL GUYOT / AFP]

Ce dimanche, les Français ont porté Emmanuel Macron et Marine Le Pen au second tour de l'élection présidentielle. Vote utile, abstention, reports de voix... Analyse des résultats et des enjeux avec Bruno Jeanbart, politologue et vice-président de l'institut OpinionWay.

Emmanuel Macron et Marine Le Pen arrivent en tête de ce premier tour, devant Jean-Luc Mélenchon. Comme prévu ?

On a effectivement la configuration qui était attendue. Les rapports de force sont conformes à ce qui avait été annoncé même si Emmanuel Macron, qui semblait perdre du terrain pendant la dernière semaine, a réussi à remobiliser ses électeurs ce dimanche. Marine Le Pen aussi fait un peu mieux qu'annoncé. Il y a vraisemblablement des électeurs qui ont choisi de voter utile. Un phénomène qui conduit à un écrasement des petits candidats par le trio de tête.

Quelque chose a donc pu se jouer dans les dernières vingt-quatre heures ?

Il y a toujours quelque chose qui se joue dans les derniers instants. Dans notre enquête, 17% des électeurs nous disent avoir fait leur choix le jour même, un taux légèrement supérieur à celui des précédentes élections.

Quels sont les principaux enseignements de ce premier tour ?

D'abord, le fait que les trois premiers candidats progressent tous par rapport à 2017. On observe une concentration du vote sur ces trois candidats.

A l'opposé, on a un électorat qui s'effondre, c'est celui des Républicains avec Valérie Pécresse qui risque de finir à moins de 5%. Eric Zemmour fait un score non négligeable (7,1%) même si c'est décevant par rapport à ce qu'il avait espéré. Il a certainement lui aussi été victime d'une forme de vote utile à l'extrême droite.

A gauche, Yannick Jadot représente une déception pour l'écologie politique. Il ne dépasse pas les 5% et fait moins que Noël Mamère en 2002. Pourtant, en vingt ans, la préoccupation environnementale a beaucoup progressé... Les franges modérées tendent à disparaître, en témoigne le score d'Anne Hidalgo qui est sans surprise catastrophique. Ses électeurs ont aussi pu être tentés par le vote utile, en se disant que Jean-Luc Mélenchon avait une chance de l'emporter.

Qu'a-t-il manqué à Jean-Luc Mélenchon pour accrocher le second tour ?

Jean-Luc Mélenchon souffre du faible niveau global de la gauche. Même en aspirant un maximum d'électeurs de gauche, il n'était pas certain de passer. La base électorale elle-même n'est pas suffisante. Il y aussi le fait qu'une partie de la gauche ne veut toujours pas voter pour lui car il est encore perçu comme trop radical. Enfin, il paye une abstention qui est assez forte (28,3, +4 points par rapport à 2017).

Comment voyez-vous le second tour ? La victoire d'Emmanuel Macron est-elle acquise ?

Avec quatre points d'avance sur sa concurrente, Emmanuel Macron est dans une situation favorable. Marine Le Pen a une réserve de voix plus forte que d'habitude grâce à Eric Zemmour mais cela reste limité. Les électeurs LR ont tendance à se reporter vers Emmanuel Macron au second tour, et Valérie Pécresse a confirmé cette tendance. De son côté, Jean-Luc Mélenchon n'a pas appelé à voter pour Emmanuel Macron mais il a insisté pour ne pas donner «une seule voix à Marine Le Pen». C'est une prise de position peut-être un peu plus forte que celle qu'on attendait et qui peut jouer pour Emmanuel Macron.

Marine Le Pen a-t-elle une chance ?

Les mathématiques lui sont défavorables. Mais si on regarde l'élection sous un angle différent, on voit que la majorité des Français ont voté aujourd'hui pour des partis contestataires. Ensemble, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour recueillent 52% des voix. Sans compter d'autres petits candidats qui portent eux aussi un discours contestataire. Les candidats en lutte contre le système ont donc rassemblé plus d'un électeur sur deux. Ce sont des luttes différentes, parfois culturellement éloignées, mais si Marine Le Pen parvient à les réunir, elle a une chance de l'emporter le 24 avril.

Comment va évoluer la campagne ? Le pouvoir d'achat sera-t-il toujours au cœur des débats ?

Aujourd'hui, 60% des Français ont voté en fonction du pouvoir d'achat. La thématique a été dominante jusqu'au jour du premier tour. Dans les prochains jours, il est probable que la guerre en Ukraine va revenir sur le devant de la scène, avec la question de l'UE également. On rentre dans une autre campagne. Jusqu'ici Marine le Pen a été un peu cachée par le phénomène Zemmour, la montée de Mélenchon et la déroute de Pécresse. Désormais, c'est un duel, elle sera davantage exposée.

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