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Elections sénatoriales : quels sont les enjeux et les risques pour le gouvernement ?

170 sièges sur 348 sont à pourvoir lors de ces élections sénatoriales, répartis sur 45 circonscriptions. [Daniel LEAL / AFP]

Les élections sénatoriales auront lieu ce dimanche 24 septembre. Si l’issue du scrutin ne présente pas beaucoup de suspense, les enjeux d’une victoire pour le clan unifié de la droite et du centre sont nombreux, avec des projets de loi à venir avant la fin du quinquennat d’Emmanuel Macron.

Une élection peu médiatique mais aux nombreux enjeux politiques. Ce dimanche 24 septembre, la moitié des sièges du Sénat sera renouvelée, comme tous les trois ans. 170 sièges sur 348 sont à pourvoir lors de ces élections sénatoriales, répartis sur 45 circonscriptions. Dans ce scrutin indirect, le corps électoral est composé de 78.000 grands électeurs, composé à 95 % de conseillers municipaux.

S’il ne devrait pas y avoir de grand bouleversement avec une majorité LR/Centre qui devrait se maintenir grâce à son implantation locale dans les villes petites et moyennes, à l’inverse de la gauche et des écologistes qui détiennent la majorité dans les grandes villes et métropoles, le gouvernement mise sur la stabilité du Sénat pour retrouver un partenaire fiable afin de faire passer de futurs projets de loi déterminants pour le quinquennat d’Emmanuel Macron, à l’image du projet de loi Immigration.

Bataille entre LR et l'Union centriste

En effet, le mode de scrutin, indirect, avec le vote de grands électeurs composés de conseillers municipaux, induit un lien très étroit avec les élections municipales. Certains vont jusqu’à voir les municipales comme le premier tour des sénatoriales, dont les effets se font sentir quelques années après, en deux temps, avec la série 1 des départements renouvelés, puis la série 2, trois ans après. Toutefois, avec la multiplication des élus non encartés, le premier enjeu de cette élection demeure dans les quelques sièges qui pourraient basculer à droite, à gauche ou au centre, et ainsi réduire ou augmenter le pouvoir de la majorité, ce qui aura fatalement un impact sur le soutien, ou non, au gouvernement. 

Premier groupe du Sénat, le groupe LR compte aujourd’hui 145 sénateurs, soit plus de deux fois plus qu’à l’Assemblée. Néanmoins, il n’a pas la majorité seul. La majorité sénatoriale est en effet composée du groupe LR et des 57 sénateurs du groupe Union centriste (UC). C’est pourquoi le rapport de force entre LR et centriste pourrait être déterminant. C’est d’ailleurs en fonction du poids de chaque groupe que sont répartis les postes à responsabilité au sein du Palais du Luxembourg (présidence de commission, rapporteur général, vice-présidents et questeurs du Sénat...).

Et si leur destin est souvent lié avec les LR, le poids des centristes n’est pas pour autant neutre politiquement. Car sur certains sujets sensibles, centristes et LR ne sont pas toujours sur la même ligne, et les points de désaccord se sont souvent multipliés ces derniers mois, créant parfois des tensions dans la majorité sénatoriale. La ligne de plus en plus droitière des LR, que porte au Sénat Bruno Retailleau, n’est parfois pas celle d’Hervé Marseille, qui préside maintenant les sénateurs de l’UDI.

Le gouvernement compte sur le Sénat pour l'immigration et le budget

À cet égard, le poids politique du Sénat pourrait être décisif pour le gouvernement. À l’image de la réforme des retraites, validée par les sénateurs avant de rencontrer plus de difficultés à l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron compte sur l’institution pour lui assurer un soutien de poids lors de l’examen des projets de loi qui devraient prochainement arriver à l’ordre du jour, comme celui sur l’immigration ou encore le budget.

Présenté en fin d'année dernière par les ministres du Travail et de l'Intérieur, le texte sur l'immigration devait au départ être examiné début 2023. Mais fin avril, la Première ministre a finalement annoncé qu'il serait repoussé à l'automne, faute de majorité solide : «Aujourd'hui, il n'existe pas de majorité pour voter un tel texte», avait-elle avoué, prenant acte de l'intransigeance des Républicains dont elle a besoin pour adopter la loi, le camp présidentiel n'ayant qu'une majorité relative à l'Assemblée.

D’autre part, l'exécutif pourrait aussi faire face à des grosses difficultés concernant le vote du budget 2024, car encore une fois l'attitude de la droite est incertaine. Si l’objectif du gouvernement est de revenir sous la barre des 3% du PIB en 2027, après trois années mouvementées pour les comptes publics pour cause de pandémie puis de crise énergétique, Bruno Le Maire a annoncé au moins 16 milliards d’euros d’économies, après avoir avancé la somme de 10 milliards dans un premier temps, aussi bien sur la Sécurité sociale que dans la sphère de l’État.

Une idée qui, pour l'heure, est encore loin de convaincre Jean-François Husson, le sénateur rapporteur (LR) de la commission des finances qui s'est déclaré «dubitatif», ni son collègue de l’Union centriste, Vincent Delahaye. «10 milliards d’euros, c’est rien du tout. Je considère qu’on doit faire des efforts partout, pas dans quelques domaines uniquement. C’est plutôt une stratégie de communication plutôt que d’action», a regretté le sénateur de l’Essonne. Les nouvelles attributions de postes et les nouveaux arbitrages rendus par les élections pourraient toutefois changer la donne. 

Le risque du 49.3

Car le risque est bien présent. Si le gouvernement ne parvient pas à obtenir le soutien indéfectible de la droite et du centre, qui commence par celui des sénateurs avant les futurs débats à l'Assemblée, Emmanuel Macron pourrait être une nouvelle fois «contraint» de faire usage de l'article 49.3 de la Constitution pour faire passer ses textes. Une stratégie très risquée, qui, en plus de faire chuter la cote de popularité du président, pourrait pousser les Français à descendre une nouvelle fois dans la rue pour manifester leur mécontentement. 

L'enjeu principal de ces élections sénatoriales pour le gouvernement est donc d'obtenir un équilibre, et des personnes nommées aux postes stratégiques, qui lui assureront un soutien majoritaire dans l'institution, et qui pourront faire pression sur les députés de la même famille à l'Assemblée. 

En cas de pertes de sièges pour le groupe majoritaire, ou de poids renforcé au sein du groupe pour les centristes (pas toujours d'accord avec la majorité présidentielle) Emmanuel Macron pourrait rencontrer davantage de difficultés pour mettre en oeuvre sa politique, et pour faire adopter ses projets de loi. 

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