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Réforme des retraites : Emmanuel Macron peut-il être destitué via l’article 68 de la Constitution ?

La politique menée par Emmanuel Macron a déclenché une vague d’indignation sur les réseaux sociaux, poussant des internautes à demander sa destitution. [Ludovic MARIN / AFP]

Depuis l’annonce du projet de réforme des retraites, l’idée d’une potentielle destitution du président de la République gagne du terrain auprès de certains internautes. Cette procédure, possible dans les faits, est néanmoins difficile à appliquer.

Après le 49.3 et le 47.1, voici l'article 68. Alors que la colère ne faiblit pas dans la rue depuis le recours de l’exécutif à l’article 49.3 en mars dernier pour faire passer sa réforme des retraites, Emmanuel Macron a pris la parole ce lundi 17 avril au soir, soit trois jours après la validation de l’essentiel du projet et deux jours après sa promulgation expresse.

Cette politique, menée par le président de la République, a également déclenché une vague d’indignation sur les réseaux sociaux poussant des internautes à demander la destitution du chef de l’Etat. Le 13 avril dernier, une pétition a été mise en ligne sur le site officiel de l’Assemblée nationale demandant le départ du locataire de l’Elysée.

«Nous croyons que votre leadership a été marqué par l'incompétence, la corruption et l'arrogance, et que vous avez trahi la confiance et les espoirs de millions de Français», ont écrit les organisateurs.

Bien que la procédure de destitution soit autorisée par l’article 68 de la Constitution, il est toutefois peu probable qu’elle soit mise à exécution ou qu’elle aboutisse au départ d’Emmanuel Macron, compte tenu du fonctionnement des institutions.

En effet, l’article en question dispose que la procédure de destitution peut être déclenchée «en cas de manquement du chef de l’Etat à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat». Il s’agit ici d’une procédure politique et non-pénale.

Ce manquement peut concerner le comportement politique et privé du président de la République «à condition que ses actes aient porté atteinte à la dignité de sa fonction», peut-on lire sur le site gouvernemental vie-publique.fr.

Cependant, Emmanuel Macron ne peut être tenu «responsable» de la situation dans laquelle se trouve la France simplement par ses décisions politiques, malgré sa détermination pour faire passer la réforme des retraites.

Le locataire de l’Elysée est en effet protégé par l’article 67 de la Constitution qui suppose que «le président de la République n'est pas responsable des actes accomplis en cette qualité».

«Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l'objet d'une action, d'un acte d'information, d'instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu», poursuit le texte, en rappelant que «les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la cessation des fonctions».

Une procédure déclenchée sous conditions

Pour que la procédure de destitution soit déclenchée, certaines conditions doivent être remplies. En effet, il faut, en premier lieu, qu’une proposition de réunion du Parlement soit adoptée, par l’Assemblée nationale ou le Sénat, en Haute Cour «à la majorité des deux tiers de leurs membres».

La proposition de résolution doit être «signée par au moins un dixième des membres de l'assemblée devant laquelle elle est déposée», selon la loi organique numéro 2014-1392 du 24 novembre 2014 portant application de l’article 68 de la Constitution.

Une fois la recevabilité et les conditions de la proposition de résolution vérifiées, celle-ci est par la suite transmise à l’autre assemblée. Cette dernière a quinze jours pour se prononcer. En cas de non-adoption, la procédure de destitution est alors terminée.

Néanmoins, selon la loi indiquée ci-dessus, «lorsqu'une proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour a été adoptée par chacune des assemblées, le Bureau de la Haute Cour se réunit aussitôt».

«Le Bureau de la Haute Cour est composé de vingt-deux membres désignés, en leur sein et en nombre égal, par le Bureau de l'Assemblée nationale et par celui du Sénat, en s'efforçant de reproduire la configuration politique de chaque assemblée», ajoute-t-on.

Ainsi, le verdict de la Haute Cour doit être rendu dans un délai d’un mois. «La majorité des deux tiers des membres de la Haute Cour est nécessaire pour prononcer la destitution du Président. Les votes s’effectuent à bulletins secrets. La délégation de vote est impossible. Seuls les votes pour la réunion de la Haute Cour ou pour la destitution sont recensés», rappelle Vie-publique.fr.

Pour rappel, une seule résolution a été déposée par des députés depuis 2007, datant de 2016. A l’époque, 79 députés LR ont demandé la destitution de François Hollande en raison de ses confidences à des journalistes sur «la défense nationale», révélées dans le livre «Un président ne devrait pas dire ça».

Après examen de la proposition de résolution par le bureau de l’Assemblée nationale, celle-ci a été rejetée. L’instance a estimé qu’elle était irrecevable, car «ne justifiant pas des motifs susceptibles de caractériser un manquement».

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