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Coronavirus : pourquoi les entreprises et les écoles échappent-elles aux nouvelles restrictions ?

Les entreprises sont, avec les établissements scolaires et universitaires, les lieux où le plus de clusters ont été identifiés. Les entreprises sont, avec les établissements scolaires et universitaires, les lieux où le plus de clusters ont été identifiés.[Unsplash / Arlington Research]

En annonçant mercredi l'instauration d'un couvre-feu en Ile-de-France et dans huit métropoles, Emmanuel Macron a semblé vouloir cibler les bars et restaurants. Une décision critiquée par certains, sur la base des données sur les clusters de coronavirus, dont une majorité a été identifiée dans les entreprises et les établissements scolaires. Sauf que ce constat oublie de prendre en compte les limites du système de détection des foyers de contamination.

C'est Jean-Luc Mélenchon qui a allumé la mèche mercredi soir, avec un tweet devenu viral. «60 % des contaminations ont lieu au travail ou à l'école ou à l'université entre 8h et 19h. Mais Macron interdit les sorties au bar et au restau entre 20h et 6h. Bienvenue en Absurdie», a fustigé le leader de La France insoumise (LFI). Il s'est rapidement fait reprendre par Olivier Véran, toujours sur Twitter. «60 % des clusters, ça signifie 10 % des contaminations identifiées. Vous confondez clusters et diagnostics», a corrigé le ministre de la Santé. «Dommage de polémiquer à l'heure où nous voulons préserver l'éducation, sauvegarder les emplois, et lutter efficacement contre cette épidémie dans l'intérêt des Français.»

Les données évoquées par Jean-Luc Mélenchon semblent s'appuyer sur le dernier point épidémiologique hebdomadaire de Santé publique France, datant du 8 octobre dernier. Celui-ci nous rappelle la définition d'un cluster («au moins 3 cas confirmés ou probables, dans une période de 7 jours, appartenant à une même communauté ou ayant participé à un même rassemblement de personnes, qu’ils se connaissent ou non»), avant de s'intéresser aux foyers de Covid-19 par type de collectivités depuis le déconfinement. Dans le tableau présenté, on apprend que les clusters en cours d'investigation se situent principalement en milieu scolaire et universitaire (35 %) et dans les entreprises privées et publiques (20 %). En additionnant les deux catégories, on se retrouve à 55 %, qui correspondent sans doute aux 60 % avancés par Jean-Luc Mélenchon.

Mais le député des Bouches-du-Rhône omet un point important, soulevé par Santé publique France lui-même. En plus d'être «probablement largement sous-estimé» selon l'établissement sanitaire, le nombre de clusters identifiés depuis le 9 mai (3.207) inclut 34.767 cas seulement. Soit seulement 5 % environ des cas de Covid-19 détectés en France depuis cette date. «Il y a donc 95 % des contaminations dont on n'arrive pas à retrouver la source», explique à CNEWS Pascal Crépey, épidémiologiste à l'Ecole des hautes études en santé publique (EHESP).

Les clusters dans les bars et restaurants sous-estimés ?

«On touche là aux limites du contact-tracing», confie sur Twitter le professeur Maxime Gignon, chef du pôle Préventions, Risques, Information Médicale et Epidémiologie au CHU Amiens-Picardie. «Tracer des contacts, c’est complexe. Identifier le moment où ils ont pu se contaminer l’est encore plus», explique-t-il. Les lieux que l'on retrouve le plus dans les clusters sont donc «les situations qui sont le plus facilement identifiables lors d’un tracing».

«C'est facile pour les entreprises, les écoles ou encore les universités, car ce sont des lieux où les gens passent le plus clair de leur temps, mais c'est moins évident pour les restaurants ou les bars», indique Pascal Crépey. Sur France Inter ce jeudi matin, le directeur général de l'Agence régional de santé (ARS) d'Ile-de-France, Aurélien Rousseau, a reconnu qu'il était «difficile» de remonter les chaînes de contamination dans ces endroits, car les personnes contaminées «ne connaissent pas les gens assis autour d'elles». C'est ce qui explique également pourquoi il y a si peu de clusters «dans les transports» ou «dans la rue», complète Pascal Crépey.

Mais les mauvaises interprétations peuvent venir de n'importe quel «camp». En voulant elle aussi blâmer les propos de Jean-Luc Mélenchon, qualifiés de «fake news», Aurore Bergé, présidente déléguée du groupe LREM à l'Assemblée nationale, a ainsi à son tour fait une déclaration à l'emporte-pièces mercredi. «Les principaux vecteurs de contaminations sont les rassemblements dans la sphère amicale et familiale», a-t-elle tweeté, une affirmation impossible à prouver faute de chiffres, bien que le rôle de ces événements dans la diffusion du virus soit souvent pointé du doigt par les professionnels de santé.

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